Décidément, et en dépit du piquant moraliste, l'affranchissement de la femme est un grand bienfait dont les résultats seront plus sensibles dans l'avenir. Nous sommes encore trop voisins de l'époque de cette émancipation pour que la valeur de ses résultats, surtout en musique, soit immédiatement appréciée. Il y a un travail secret que le temps seul opère dans les entrailles des générations. La femme-compositeur est encore sous le coup d'immenses obstacles, qui équivalent souvent à des impossibilités réelles, et gênent, non seulement l'essor, mais encore la circulation publique de sa pensée... On ne leur met guère les doigts sur le clavier que pour aboutir à des polkas, à des valses, à l'accompagnement d'une romance, ou à des tours de force d'exécution qui font s'exclamer les amis de la maison, sans que l'intelligence y soit pour un millionième. De ranger dans le programme des études d'une jeune fille celle de la composition, ne serait-ce que comme moyen d'analyse et d'interprétation éclairée, c'est ce qu'on a garde de faire... Ne soyons pas surpris de ne voir qu'un nombre limité de femmes s'engager sur les routes épineuses de la production musicale, surtout de la haute composition. Qu'on en tire néanmoins aucune conclusion défavorable contre leur aptitude. Les exemples passés plaident leur cause ; le temps viendra où elles la gagneront, et fonderont, libres à leur tour, la république musicale des femmes.
Maurice Bourges, critique musical
Revue et gazette musicale, 26 septembre 1847
Il s'agit de la manière même de désigner les femmes qui écrivent de la musique. Vous leur permettez, messieurs les académiciens, d'être bonnes lectrices, vous trouvez également bon qu'elles soient accompagnatrices, et si pour bien des choses vous entriez en lice avec elles vous convenez que dans le nombre vous pourriez rencontrer de dangereuses compétitrices ; pourquoi donc ne leur laissez-vous pas la liberté d'être compositrices ? Et de quel droit vous étonneriez-vous qu'elles fussent autrices excellentes, de même que plusieurs sont actrices sublimes ?... Grâce pour nous, messieurs les académiciens, ne nous forcez pas, pour nous conformer à vos règles, de parler un langage barbare, et de plus irrégulier. Nous ne vous obéirons pas ; nous braverons votre colère... Corrigeons donc hardiment les barbarismes et solécismes académiques ; employons les mots nouveaux qui deviennent nécessaires, et déclinons-les régulièrement... Les noms d'auteur et de compositeur appliqués aux femmes avec une terminaison masculine sont pour elles une injure véritable et semblent indiquer l'habitude inconvenante de regarder le talent chez la femme comme un véritable phénomène.
Adrien de La Fage, compositeur et musicologue
Revue et gazette musicale, 3 octobre 1847
L'admission des femmes à l'égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la civilisation et elle doublerait les forces intellectuelles du genre humain.
Stendhal, écrivain.
De l'amour, 1822
Les femmes n'ont pas tort du tout quand elles refusent les règles de vie qui sont introduites au monde, d'autant que ce sont les hommes qui les ont faites sans elle.
Montaigne, philosophe
Essais, 1580
On ne doit jamais battre une femme même avec une fleur ?
Jean Anouilh, dramaturge, écrivain.
Tu étais si gentil quand tu étais petit, 1972
Monsieur. Je m'associe du fond du cœur à votre utile manifestation. Depuis 40 ans je plaide la grande cause sociale à laquelle vous vous dévouez noblement. Il est douloureux de le dire, dans la civilisation actuelle il y a une esclave. La loi a des euphémismes, ce que j'appelle une esclave, elle l'appelle une mineure... L'homme a fait verser tous les droits de son côté, tous les devoirs du côté de la femme... Dans notre législation telle qu'elle est, la femme ne possède pas, elle n'este pas en justice, elle ne vote pas, elle ne compte pas, elle n'est pas. Il y a des citoyens, il n'y a pas de citoyenne. C'est là un état violent, il faut qu'il cesse.
Victor Hugo, poète, écrivain, romancier
Lettre adressée à Léon Richer, rédacteur en chef de L'Avenir des femmes, 7 juillet 1872
Quelles raisons pouvons-nous avoir d'exclure les femmes des charges et des emplois ?... Pourquoi ne les pas élever sur le même ton que nous, et ne les pas plier dès l'enfance aux sciences, aux arts, aux exercices gymnastiques ou militaires, enfin à la politique ou au gouvernement ?
Platon, philosophe
De la République. IVème siècle av J-C
L'esprit n'a point de sexe... les femmes sont aussi nobles, aussi parfaites et aussi capables que les hommes.
François Poulain de la Barre, écrivain et philosophe
De l’égalité des deux sexes, discours physique et moral, 1673